URBANISATION RAPIDE DE L’AFRIQUE. QUELLES INDUSTRIES CULTURELLES ET CREATIVES (ICC) POUR SOUTENIR LA RELANCE ECONOMIQUE ET LA CREATION D’EMPLOIS POUR LES JEUNES ? « LA CULTURE EST CREEE ET DIFFUSEE PAR LES VILLES ».

Selon les experts, plus de 90% des musiques populaires dans le monde sont d’origine ou d’influences Africaines.

Et Selon S4EY dans un rapport publié en septembre 2020, « Nollywood», (le surnom donné à l’industrie de la production cinématographique Nigériane), est le deuxième employeur du pays  après le secteur agricole, créant 300 000 emplois directs. Né dans les rues de Lagos, «Nollywood», a permis au Nigéria d’être depuis 2009, la deuxième puissance cinématographique au monde en nombre de films produits par an. Après l’Inde (Bollywood) mais devant les États-Unis (Hollywood),

EXPLOITER LE POTENTIEL UNIQUE DES 10 SECTEURS DES INDUSTRIES CULTURELLES ET CREATIVES : 1-Arts visuels ; 2-Publicité ; 3-Télévision ; 4-Presse ; 5-Spectacle vivant ; 6-Musique ; 7-Livre ; 8-Jeu vidéo ; 9-Cinéma ; 10-Radio.

Alors que l’Afrique, avec ses abondantes ressources naturelles, n’arrive pas à traduire ce potentiel en prospérité, la promotion des ICC qui font appel au talent individuel et non aux ressources matérielles, peut être une alternative pour le développement économique et la création d’emplois pour les jeunes. Le talent n’est pas une ressource rare, même en Afrique. Seules manquent les opportunités pour lui permettre de s’exprimer.

  • INDESTRUCTIBLES : DUREMENT ATTEINTS PAR LES IMPACTS DE LA COVID-19, LES ARTISTES CONTINUENT MALGRE TOUT LA BATAILLE EN PREMIERE LIGNE CONTRE LA PANDEMIE

Selon l’UNESCO, la culture est ce que nous sommes et ce qui façonne notre identité. Puisque les cultures établissent les relations entre les personnes et leur société et avec le monde qui les entourent, y compris avec leur environnement naturel ; mais aussi parce que les cultures conditionnent leur comportement. Les acteurs du secteur culturel sont ceux qui essaient d’exprimer cette manière singulière d’un peuple d’exister et d’expérimenter le monde à travers des œuvres matérielles et immatérielle. Ces productions vont des œuvres littéraires aux sculptures, aux chansons, aux médias, etc. En période de crises sociales, toute la société se tourne vers les artistes pour trouver ou amplifier des solutions. C’est ainsi que malgré que le secteur soit durement touché par les impacts des mesures barrières, dont la distanciation sociale (les annulations des concerts et spectacles, l’interdiction des rassemblements, et la fermeture des bars et restaurants, etc.), les artistes sont en première ligne pour imaginer et produire des œuvres de sensibilisation des populations contre la maladie (chansons, messages publicitaires, etc.), pour les égayer et les apaiser dans la sollicitude du confinement et/ou de la quarantaine, pour les assister et les accompagner à traverser cette crise planétaire.

L’expérience de la COVID-19 démontre donc la puissance et l’importance de ce secteur dans la sensibilisation populaire et l’accompagnement des politiques de cohésion sociales. Les activités créatives, culturelles et artistiques sont vitales pour notre sentiment de bien-être. Pendant la pandémie, l’art et la musique ont soutenu des personnes isolées et confinées. Les chanteurs, danseurs et musiciens ont réconforté les gens via Internet ou depuis leur balcon en Europe. Les œuvres artistiques permettent aussi de véhiculer des valeurs, d’amener une prise de conscience sur des problèmes sociaux contemporains, de nous exposer à une autre vision du monde, etc. Ce que les artistes disent reflète dans une certaine mesure la mentalité du peuple et son mode de vie, influençant ainsi la dynamique de la société. Mieux organiser, ce secteur peut consolider les valeurs positives dans les sociétés.

Cependant, ce qui est moins connu ou apprécié, c’est la valeur économique du secteur créatif, également appelé « économie orange ».  Par exemple, le premier roman (le manuscrit) Voici venir les rêveurs de la Camerounaise Imbolo Mbue a été acheté 1 million de dollars, en 2014, par l’américain Random House.

Selon les spécialistes, le secteur est caractérisé par :

  • Plus d’emplois. Avec une contribution croissante des ICC au PIB mondial et au commerce international. Bien positionné dans l’économie numérique ;
  • De meilleurs emplois. Avec un secteur dépendance à des actifs durables (peu d’utilisation de matière premières). Moins volatil aux chocs externes.
  • Des Emplois inclusifs. Avec une participation élevée des groupes de jeunes, de femmes et de minorités. Moyens de subsistance des travailleurs informels.

Aujourd’hui, la création est au cœur des ICC et elle est devenue un modèle de constitution de la valeur pour l’économie du futur (économie post-industrielle ou société de la connaissance selon les appellations choisies).

  • ESSAI DE DEFINITION DES ICC OU DE “L’ECNOMIE ORANGE”

Selon « Solutions for Youth Employment (S4YE) », l’« économie orange» fait référence à une gamme d’activités économiques dans les industries culturelles et créatives (ICC), où l’objectif principal est «la production ou la reproduction, la promotion, la distribution ou la commercialisation de biens, services et activités de contenus dérivés d’origines culturelles, artistiques ou patrimoniales». Une caractéristique clé de ces secteurs est que leurs services et produits reposent sur le talent, la créativité et les actifs intellectuels comme principaux intrants.

Les industries créatives et culturelles (ICC) se distinguent par le fait que la création est au centre de la formation de la valeur. Par création, on entend les différents processus et activités dont les résultats sont, de façon prédominante, immatériels. Dans les ICC, la valeur symbolique et la création de contenus tiennent une place centrale. Elles ont généralement des frontières juridiques (droit d’auteur ou copyright). Elles créent et enrichissent le lien social, l’identité et l’attractivité des territoires qui les accueillent. Elles participent au rayonnement des pays et territoires.

Il n’y a pas de définition officielle d’Industries Culturelles et Créatives. On distingue cependant cinq (5) industries culturelles (la Musique, les Livres, la Radio et la Télévision, les Films et le Cinéma, les Jeux Vidéos) dont les contenus se base sur de la narration ou la création de contenus ou encore du « story telling ». Trois (3) industries créatives (le Design, l’Architecture et la Publicité). Et Deux (2) industries culturelles transversales (les Arts Visuels et les Arts Vivants) à la base de la formation des artistes et de l’acquisition des techniques appliquées dans toutes les autres filières.

  • LES ACTIVITES CREATIVES, CULTURELLES ET ARTISTIQUES SONT GEOGRAPHIQUEMENT CONCENTREES

 En considérant la culture sous l’angle de la création, de la production et de la représentation artistiques, on s’aperçoit que celles-ci se réalisent de manière privilégiée dans le contexte de la ville. La production des médias nationaux est concentrée dans deux ou trois grandes villes des pays. C’est dans les villes que sont localisés les lieux de production et de diffusion artistique (équipements culturels de rang national et international, opéras, salles de concert, théâtres, librairies, musées, galeries d’art, …), mais aussi les marchés de l’art et les associations artistiques. C’est aussi dans les villes que se rassemblent les principaux acteurs culturels : les créateurs, les médiateurs (directeurs d’établissements culturels, politiques en charge de la culture, organismes de soutien à la création) et les « récepteurs », autrement dit les publics de la culture, les consommateurs.

Des métropoles comme la ville de BILBAO ont placé la créativité, le design et la culture au cœur de leur stratégie locale de développement en tant que facteurs de cohésion des communautés locales, mais aussi comme un moteur de transformation économique et sociale. Ainsi, grâce à l’appui des secteurs public et privé et à une vaste participation sociale, Bilbao est devenue une référence dans des domaines comme l’architecture, l’industrie et la décoration d’intérieur, les nouvelles technologies, la mode, l’audiovisuel, les jeux vidéo et l’artisanat.

A l’orée de sa transition urbaine où l’attention des décideurs publics africains est absorbée par les important montants d’investissements nécessaires pour bâtir les infrastructures physiques qui vont permettre de recevoir les nouvelles populations urbaines dans de bonnes conditions, cet article a pour but de placer les infrastructures culturelles dans les projets d’investissement stratégiques ou prioritaires. Cette caractéristique de concentration géographique permet d’influencé sur la culture en investissement intelligemment dans les villes.

En effet, selon les Nations Unies, 60 % de la population mondiale vivra en zone urbaine en 2030. D’ici là, il y aura un milliard de citadins supplémentaires, et ils se trouveront essentiellement en Asie et en Afrique, deux régions qui sont le théâtre de transformations qui auront une incidence permanente sur leurs trajectoires économiques, environnementales, sociales et politiques. La feuille de route proposée par l’ONU pour bâtir des établissements humains durables est l’Objectif de Développement Durable (ODD) n° 11 qui vise à s’assurer que les villes et autres établissements humains sont sûrs, inclusifs, résilients et durables, en ciblant notamment les problèmes de logement et d’insalubrité, les transports, les processus de planification participative, le patrimoine culturel, la gestion des déchets, la qualité de l’air et la gestion des risques de catastrophe.

  • COMMENT SOUTENIR LA CREATION D’EMPLOIS DANS LES ICC OU DE L’ECONOMIE ORANGE?
  •  RENFORCER LE CAPITAL HUMAIN

Elle passe par la Formation technique et professionnelle, la Formation à l’entrepreneuriat, le renforcement des Services de développement des affaires, l’Apprentissage entre pairs, le développement de Programmes d’incubateurs et d’accélérateurs, la construction d’Infrastructure et espaces de travail, l’installations de production et l’accès aux équipements, le développent des possibilités de Stages et apprentissages, la Sensibilisation à la culture et aux professions créatives, etc.

  • FOURNIR UN ACCES AU FINANCEMENT

Il peut s’agir de Subventions, de Prêt de démarrage ou Fonds de capital-risque, de Microcrédits ou de Garanties, des Financement participatif, de Subventions fiscales ou encore de Concurrence commerciale.

  • ÉLARGIR L’ACCES AUX MARCHES

 On peut y arriver par le développement et la promotion de Foires commerciales, de festivals, d’événements, de Plateformes de commerce électronique, de Plateformes B2B ou B2C en ligne et de  Canaux de distribution en ligne, etc.

  • CREATION DE RESEAUX ET DE CLUSTERS

Peu développés, la création de réseaux se fait en à travers la construction de Pôles créatifs ou espaces de coworking, la promotion de l’Image de marque ou marketing des villes, villages (artisanal, etc.), le Développement des infrastructures, la promotion des Attractions et sites touristiques, l’organisation et le soutien aux Associations artistiques et professionnelles, la création de Réseaux régionaux.

  • EXPLOITER LA TECHNOLOGIE NUMERIQUE

Le numérique a un impact sur la diffusion et sur la création. Au cinéma, on ne travaille plus sur pellicule, les tournages sont entièrement numériques. Et les cinémas ne reçoivent plus des bobines, mais des fichiers numériques. Pour la mode, cela joue aussi, et notamment s’agissant de la diffusion. Les grandes marques de luxe ont toutes développé des sites, qui sont à la fois des galeries virtuelles, et des espaces qui contribuent à leur image, parce que leurs sites sont toujours soignés, créatifs. De plus, elles vendent aujourd’hui beaucoup via Internet. Il y a aussi un marché sur le net pour les œuvres d’art.

Ce qui manque cependant en Afrique et même en Europe, ce sont de grandes entreprises du numérique. Les géants du web type Google, Apple, Facebook, Amazon (GAFA), sont des entreprises américaines. Google est présent partout et est très actif dans le champ de l’art avec le Google art projet Google books…

Actions à mener : renforcer les compétences numériques des acteurs culturels par la formation technique ; renforcer les infrastructures des technologies de l’information et de la communication (TIC) et l’accès à Internet ; soutenir et/ou construire des Hubs technologiques et Plateformes en ligne et promouvoir le Freelance en ligne.

La filière du Livre et de la Musique dépendent  encre des pays développés pour les phases de  la production, la promotion et parfois de la distribution, privant ainsi contient d’une large part des revenus de ces secteurs. La relocalisation de ces activités en Afrique est une nécessité. De même certaines filières ont besoin de soutien spécifiques pour conquérir le marché international. Un spécialiste des ICC nommé dans chaque ambassade des pays africains dans les pays développés pour faire la promotion de ces filières auprès de la diaspora et dans ce marché global pourrait être une solution. Les filières du Cinéma, de la Gastronomie et des jeux vidéo et films d’animation pourraient bénéficier de cette organisation.

  • DES SECTEURS A RENFORCER
  • LE CINEMA

Nollywood 

Selon wikipédia, le terme « Nollywood » est un mot-valise associant le « N » de Nigéria et le « ollywood » de Hollywood (suivant le même modèle que l’expression Bollywood : « B » de Bombay et « ollywood » de Hollywood).

Classé deuxième dans le monde en matière de production cinématographique, Nollywood a cependant besoin de financement et de formation des acteurs pour rehausser le niveau de la qualité de de ses productions au niveau des films de Hollywood par exemple.

  •  DES SECTERUS EMMERGENTS

Le basculement de la Télévision Analogique à la TNT s’explique en Afrique par l’obsolescence des équipements analogiques utilisés en télévision dont la fabrication est arrêtée et les pièces de rechange de plus en plus introuvables. Il y a aussi la nécessité de libérer les fréquences UHF et VHF pour d’autres utilisations à valeur ajoutée notamment dans le domaine de la téléphonie mobile. Quant aux avantages de la TNT, il y a, par exemple, la possibilité de diffuser plus de chaînes de télévision à travers les fréquences, la meilleure qualité de l’image et du son.

Le basculement et la libéralisation du secteur des Télévision Numérique demande un renforcement de la capacité des acteurs pour la production de contenus de qualité et la création d’entreprises économiquement viables. L’appui à la coproduction et au réseautage permettra d’améliorer la qualité des productions.

  • LES JEUX VIDEOS ET FILMS D’ANIMATION

Des productions destinées à améliorer l’images des noirs et des arabes présentés comme des terroristes ou des voleurs dans la plupart des jeux et films d’animation selon les spécialistes, la création des jeux vidéo africains est une nécessité. Cependant, c’est encore une industrie naissante avec très peu de centres de formation.

  •  DES SECTERUS EN PLEINE REORGANISATION
  •  L’HUMOUR

En pleine restructuration avec des acteurs comme MAMANE, l’objectif visé est que les amuseurs publics parviennent désormais à vivre (plus ou moins bien) de leurs blagues sur le continent. Il veut contribuer à la professionnalisation et la promotion de l’humour en Afrique. Il organise à cet effet et ce, depuis 2014, un Festival d’humour en Côte d’Ivoire, Abidjan Capitale du Rire, qui réunit chaque année de nombreux humoristes africains et internationaux, il imagine également un grand programme TV panafricain, le Parlement du rire, qu’il produit et où il joue le rôle du Président aux côtés de ses trois vice-présidents : Michel Gohou, Digbeu Cravate et Charlotte Ntamack.

Alors qu’il est courant de rencontrer dans n’importe quelle ville d’Europe ou d’Amérique des restaurant « Chinois » ; « Japonais » ou « Vietnamien », les restaurant africains se comptent au bout des doigts malgré la présence d’une forte communauté africaine sur ces continents.

Des représentant de l’art culinaire africain existent sur tous les continents dont Pierre Thiam, Chef, auteur, restaurateur, entrepreneur social et ambassadeur culinaire basé à New York. Ils gagneraient tous à être connus aussi bien sur le continent que dans leur pays d’accueil. Des émissions spécialisées sur des chaînes africaines ou la création et la promotion d’une chaîne de télévision spécialisée sur la gastronomie africaine pourrait aider à connaître cette filière.