URBANISATION EN AFRIQUE ET LES ACCORDS INTERNATIONAUX SUR LE PHENOMENE URBAIN DANS LE MONDE

 

Selon l’ONU-HABITAT, les villes africaines doivent se préparer à héberger un demi-milliard de personnes au cours des vingt ans à venir.  La marche vers l’urbanisation est une opportunité pour de nouvelles sources d’emplois, les urbains étant des consommateurs nets de services et de biens dont ils ont besoins sur une base quotidienne ; se nourrir, se loger, se déplacer, se recréer, se soigner, s’éduquer, etc. En général c’est le secteur informel et les importations qui apportent des réponses à la plupart De ces besoins des citoyens dans les villes africaines en l’absence de structures formelles de production de biens et services. L’urbanisation se présente donc sur le continent comme un défi majeur, mais aussi et surtout comme une opportunité pour développer le secteur de l’économie moderne afin de répondre aux demandes présentes des populations.

Pour ce faire, l’Afrique qui a la population la plus jeune au monde et majoritairement urbaine, a besoin de villes attrayantes pour créer des emplois modernes et réaliser son futur potentiel, c’est pourquoi le continent doit assumer un rôle de leader sur la thématique urbaine. Le nouvel agenda urbain suggère que ces villes soient plus équitables pour les personnes et les biens.

Pour « Brookings Institution » dans son dernier rapport intitulé « ForesightAfrica2020 », le Nouvel Agenda Urbain de l’ONU-Habitat dénommé HABITAT III « suggère que ces villes soient plus équitables pour les personnes et les biens. Elles sont bien planifiées, les logements y sont abordables et dépourvus de ségrégation spatiale ; les habitants sont bien connectés aux opportunités et les uns aux autres ; il est à la fois possible et utile de marcher, car le mitage y est restreint, les trottoirs sont prioritaires, la pollution est faible, l’énergie est durable, la technologie est utilisée de manière créative et toutes les personnes sont les bienvenues (sauf peut-être les criminels, car ces villes sont censées être sûres). Tous ces aspects sont d’une manière ou d’une autre liés à la forme des villes ».

Si depuis Habitat I (1976), soit près de 45 ans, la communauté internationale qui s’est emparée de la question de l’urbanisation galopante du monde, est restée impuissante à endiguer la croissance massive du nombre de personnes vivant dans des quartiers précaires et sous-équipés notamment en Afrique, la volonté de l’Afrique de redéfinir la nature de ses relations au sein du continent et avec le reste du monde est-elle en phase avec la réalisation du Nouvel Agenda Urbain ?

Selon des experts africains, l’Agenda 2063 (Union africaine, 2015), qui peut être lue comme la contribution de l’Afrique à divers objectifs et processus politiques mondiaux prend en compte la transition urbaine de l’Afrique qui est considérée comme une opportunité pour atteindre les objectifs énoncés par l’Union africaine (UA) dans sa vision stratégique à long pour une « Afrique intégrée, prospère et pacifique, dirigée par ses propres citoyens, et représentant une force dynamique sur la scène internationale». Cet Agenda 2063 présente dans ces grandes aspirations au nombre de 7, de grandes similarités avec les sommets internationaux des Nations Unies convoqués en 2015 et 2016, sur la réduction des risques de catastrophe (Sendai), sur le financement du développement (Addis-Abeba), sur les objectifs de développement durable pour 2030 (New York), le sommet sur le climat (Paris) et Habitat III (Quito). Ces aspirations préfigurent « l’avenir que nous voulons pour l’Afrique’ ». Par exemple, l’Aspiration n°1 prévoit que « les villes et autres établissements sont des centres d’activités culturelles et économiques, dotés d’infrastructures modernes, et où les populations ont accès à tous les services de base essentiels, notamment le logement, l’eau, l’assainissement, l’énergie, les transports publics et les TIC ».

De plus, l’Agenda 2063 définit un programme de mise en œuvre sur dix ans qui lui permet de transposer dans le droit du continent les résolutions des accords internationaux sur l’urbanisation.

Malgré la prise en compte des recommandations des accords internationaux dans les plans de mise en œuvre de l’Agenda 2063 et la prise de conscience de nombreux dirigeants politiques du continent sur l’importance des villes dans le développement économique des pays, de nombreux déficits persistent :

– les déficits du continent africain en termes d’infrastructures affaiblissent son développement industriel et mettent en évidence l’enlisement de sa valeur ajoutée manufacturière. L’urbanisation rapide offre l’opportunité d’investir dans les infrastructures durables à même de rendre les villes productives et compétitives, créant des plateformes où le secteur privé peut prospérer, et où  les talents et les IDE du monde entier peuvent produire pour les marchés locaux et pour le reste du monde ;

–  la valeur ajoutée agricole reste très faible par rapport aux normes mondiales, en raison notamment d’un investissement agricole limité, responsable à son tour de l’insuffisance de la couverture du réseau d’irrigation et d’une insécurité alimentaire galopante. L’urbanisation rapide offre l’opportunité de renforcer l’investissement dans le secteur agricole au-delà de la hausse des investissements publics alloués à l’agriculture à hauteur de 10% des budgets nationaux, conformément aux recommandations du Protocole de Maputo, et d’augmenter la productivité du  secteur, de réduire les importations et de nourrir les villes africaines et le monde ;

– malgré des avantages certains comme la motorisation modérée des villes et le fait que les villes et métropoles africaines sont compactes en général, elles souffrent d’un manque de planification systématique ou de la non mise en œuvre des plans réalisés selon les règles de l’art. L’urbanisation rapide offre l’opportunité de combler les lacunes du tissu urbain et de densifier les villes pour améliorer l’accessibilité ;

– malgré l’ouverture des débats dans le processus des accords internationaux à une diversité d’acteurs non étatiques publics et privés qui incarnent la nouvelle force des villes, ces accords sont avant tout produits pour les pays. Leur contextualisation au niveau des collectivités territoriales et des gouvernements locaux font largement défaut et fragilise ainsi leur mise en œuvre efficace ;

– l’absence d’acteurs non étatiques engagés au niveau des pays africains (associations, ONG, think thank, etc.) ou d’institutions spécialisées capables de disséminer les conclusions de ces accords dans toutes les couches sociales des nations rend difficile une adhésion populaire et un engagement des citoyens  et une mise en œuvre efficace de ces accords au niveau des territoires. . En effet, une interface entre les Etats, les Collectivités Territoriales,  les Associations et Communautés locales est indispensable pour aider à faciliter l’appropriation et le déploiement de ces accords au sein des organisations telles que. les entreprises, les collectivités territoriales, les associations et les communautés locales.